• ARAMON : La "Peire que rode"

    par Aimé Lamouroux

    18 décembre 2013

     

    Cet été, j’ai séjourné dans un village du Midi, Aramon, situé en bordure du Rhône, à quelques kilomètres au sud d’Avignon. Administrativement on est encore en Languedoc mais l’on y sent déjà un parfum de Provence, la traversée du fleuve, aujourd’hui facilitée par un nouveau pont, suffisant à changer de région en même temps que de rive. De nombreux vacanciers, lancés sur les autoroutes, ne passent pas très loin mais ne prennent guère le temps de s’arrêter tant ils sont pressés d’atteindre les plages méditerranéennes, but de leur transhumance. Seuls les embouteillages, fréquents en période estivale, les contraignent à ralentir, mais alors, fourbus après de longs trajets, accablés de chaleur, ils ne sont plus d’humeur à admirer la beauté des paysages et ne pensent plus qu’à une seule chose : se tremper dans l’eau qui les régénèrera.

    J’étais heureux de retrouver ce village où, quand j’étais enfant, je venais régulièrement passer d’agréables vacances chez mes grands parents. Quelques amis devaient me retrouver. J’étais chargé de leur proposer une promenade dans les collines environnantes avec un circuit sportif, mais pas trop, enrichissant et, si possible, pimenté de quelques curiosités locales. Ils adoraient faire de nouvelles découvertes. Pour occuper le temps libre que leur avait apporté la retraite ils voyageaient avec acharnement et voulaient, avant leur dernière heure venue, avoir tout vu, tout connu, du moins l’espéraient- ils. Les voyages étaient devenus pour eux une nourriture indispensable et dès que l’un s’achevait, sitôt les photos visionnées et classées, ils se replongeaient dans les catalogues touristiques avec l’espoir de dénicher de nouvelles destinations. Je craignais qu’une simple promenade en garrigue ne fasse guère fantasmer ce public exigeant. Aussi, en désespoir de cause, je me résolus à chercher du l’aide à l’office de tourisme qui venait d’ouvrir récemment sur la place du village.

    Après avoir traversé la place ombragée de platanes, presque déserte en cette fin de matinée, si ce n’est quelques personnes assises à la terrasse du café qui se remettaient des premières chaleurs de la journée, j’entrai dans l’office de tourisme. Une fraîcheur agréable régnait dans la pièce d’accueil. Sur la grande table centrale et sur un présentoir, différentes plaquettes rangées avec soin incitaient à découvrir le village et ses environs. Deux jeunes femmes étaient assises au fond de la pièce, l’une feuilletant distraitement une revue, l’autre contemplant l’écran d’un ordinateur qui ronronnait paisiblement. Elles me regardèrent avec curiosité, se demandant ce que je pouvais bien chercher à une heure pareille, juste avant la fermeture pour la pause de midi.

    « Vous désirez monsieur ? » me demanda celle qui devait être la responsable, avec dans le regard la nette intention de se débarrasser de moi le plus rapidement possible. Elle avait l’accent pointu des parisiennes. Je me demandais quels hasards de la vie l’avaient conduite ici : peut-être un coup de foudre pour un méridional rencontré à l’occasion de vacances ? L’attrait du soleil et les charmes de la région avaient probablement fait le reste. Mais ce n’était pas mon problème. J’expliquai rapidement le but de ma visite en insistant sur le fait que je désirais un parcours sortant de l’ordinaire. Elle me récita le contenu de la brochure :

    «Nous avons plusieurs circuits à vous proposer : celui des paluns où le Rhône s’étale en période de fortes crues, celui des collines d’où vous avez de belles vues sur le fleuve avec dans le lointain les villes d’Avignon au nord et de Tarascon au sud, et celui des capitelles, tout nouveau. Ces anciens abris, uniquement constitués de pierres sèches, viennent d’être dégagés des broussailles qui les avaient envahis au fil des années. Vous voyez, vous avez le choix ! »

    J’étais perplexe. Quelques capitelles suffiraient-elles à satisfaire la curiosité de mes amis que plus grand-chose ne devait étonner ?

    Voyant mon air embarrassé, sa collègue vint à la rescousse : «Il y a aussi le circuit de la Peire que rode ! Il est un peu plus long, mais cela vaut la peine. » Son accent faisait davantage couleur locale. Elle devait être originaire de la région et mieux connaître les environs du village. « C’est un site très curieux, inscrit à l’inventaire des monuments mégalithiques aux archives de Nîmes. Beaucoup de légendes courent sur ce site : il s’agirait d’un rocher capable de tourner sur lui-même, du moins on l’entend dire ! Tenez, il me reste encore un document décrivant ce circuit. En partant d’ici c’est très simple : vous traversez le village et prenez la première rue à gauche après le pont du château. Vous empruntez ensuite le chemins des oliviers, puis celui des amandiers, et après la croix de Gabure, vous filez tout droit en direction du nord par le GR42. Vous verrez, c’est marqué ! »

    Sa proposition m’intéressa et en même temps le nom de cet endroit me revint en mémoire. Autrefois, au cours d’un promenade avec mon grand-père nous étions passés à proximité et il me l’avait montré en m’expliquant que c’était un rocher qui avait été creusé par d’anciens bergers pour abriter leurs troupeaux, mais il ne m’en avait pas dit davantage. Il ne devait pas croire aux légendes. Je remerciai mes conseillères et décidai d’aller revoir cet endroit mystérieux.

     

    Le lendemain, dès l’aube, profitant de la fraîcheur matinale, je me lançai dans l’aventure. Avec l’aide du plan je trouvai facilement mon chemin et atteignis bientôt les premières collines. Les alentours du village avaient beaucoup changé. L’espace naturel avait cédé la place à une zone fortement urbanisée. De nombreuses habitations, souvent avec une piscine, avaient surgi de tous cotés, jusque dans les moindres vallons et escaladé le flanc des collines. Les friches, royaumes des lapins de garenne, étaient devenues des terrains méticuleusement entretenus où les pins s’étaient en grande partie substitués aux amandiers et aux oliviers.

    Après une demi-heure environ, je sortis de la zone urbanisée et retrouvai le chemin caillouteux de mon enfance, « lou camin di capitello » disaient les anciens. Passé cette limite, la végétation méditerranéenne avait repris ses droits et envahissait désormais la totalité de l’espace. Les clapas délimitant chaque parcelle, qui avaient été montés au fil des années par les propriétaires successifs, avec pour seul matériau les pierres extraites du sol pendant le travail de la terre, s’étaient depuis longtemps effondrés après que les hommes, trouvant l’entretien de ces surfaces ingrates trop pénible et peu rentable, les aient abandonnées. Quelques oliviers subsistaient encore, réduits à l’état de buisson par les rejets qui les étouffaient, tandis que couraient en tous sens des plantes épineuses parfaitement adaptées à la sécheresse de l’été : chêne kermès, salsepareille, asparagus, ronces… L’état naturel était de retour.

    J’arrivai bientôt au sommet d’une colline. En me retournant je découvris une superbe vue sur le paysage que je venais de traverser. Au nord, se dressait au loin la masse imposante du mont Ventoux, dont le sommet recouvert d’étalements de rocailles semblait tapissé de neiges éternelles dans la lumière du levant. Plus bas se profilait la ville d’Avignon reconnaissable à la forme caractéristique de son palais des Papes. En me retournant en direction du sud, je découvris une superbe vue sur le Rhône. C’était devenu un vaste plan d’eau depuis la construction d’un barrage à quelques kilomètres en aval. Sa surface miroitait paisiblement au soleil du matin et lui donnait l’image d’un fleuve désormais pacifié. Une péniche, en apparence immobile, montait sa cargaison de pétrole vers les raffineries de Lyon. Je cherchais, comme dans le jeu des sept erreurs, les anomalies ne correspondant pas à mes souvenirs : le bac à traille manoeuvré par son intrépide passeur à la jambe de bois, qui allait et venait d’une rive à l’autre accroché à son câble, avait disparu. Il était remplacé par un pont flambant neuf, continuellement emprunté par des véhicules qui, du haut de mon promontoire, faisaient penser à des fourmis. Tout près du pont une usine pharmaceutique s’était développée, dont les bâtiments grignotaient les collines. Plus loin, vers le sud, une centrale thermique EDF se dressait avec sa cheminée rayée de bandes rouges et blanches montant dans le bleu du ciel. Elle était le centre actif d’un réseau arachnoïdien de câbles haute tension qui alimentaient en électricité la région, et même au-delà. Du haut de ma colline je ne pouvais m’empêcher de superposer deux images, celle de ma mémoire et celle du présent et je constatais que l’environnement du village avait été profondément modifié, l’activité industrielle ayant pris le pas sur l’activité rurale.

    Heureusement, il restait encore des zones préservées ; mon lieu de promenade en faisait partie. Poursuivant mon chemin, je tombai face à une capitelle que j’avais connue autrefois sous la forme d’un éboulis de pierres, mais elle venait d’être magnifiquement restaurée. La partie supérieure, avec son orifice pour l’évacuation des fumées, était refaite, l’intérieur dégagé, les alentours défrichés. Elle était mise en valeur par deux cyprès et quelques oliviers bien entretenus. Elle avait perdu sa fonction d’origine, mais je ne pouvais m’empêcher de l’admirer tout comme on admire une œuvre d’art. La mairie avait vraiment mis les moyens pour le succès de son circuit et l’agrément des randonneurs. En tout cas, j’avais déjà là une curiosité pour mes visiteurs : d’un coté, avec la capitelle, une image du passé, de l’autre, avec les aménagements le long du Rhône, celle du présent. Il ne manquait que l’avenir, mais cela pourrait faire l’objet d’intenses discussions.

    Le chant des cigales démarrant leur journée me rappela que ma route était loin d’être terminée. Je repartis, toujours en direction du nord. J’atteignis bientôt un petit vallon dans lequel les sédiments apportés par les eaux de ruissellement avaient permis la culture de quelques pieds de vigne. L’endroit était favorable au développement du gibier et j’espérais, comme autrefois, l’envol bruyant d’une compagnie de perdreaux ou la débandade effrénée d’une bande de garennes fuyant sous des armas. En vain... Les chasseurs devraient lâcher des faisans d’élevage avant la période de chasse s’ils voulaient éviter de rentrer bredouilles le jour de l’ouverture…

    Le chemin grimpait ensuite vers une sorte de col entre deux collines. Dans la partie haute, la caillasse cédait la place à la pierre brute et je constatai, en arrivant au sommet, que la pierre était creusée de deux profondes ornières, probablement causées par l’usure consécutive aux multiples passages des chariots et charrettes qui avaient jadis empruntés cette voie. Quelles activités avaient conduit ici tous ces attelages ? Il faudrait que je m’informe…

    Après le col, s’étendait sur environ un kilomètre une zone caillouteuse, essentiellement constituée de galets, probablement un ancien lit du Rhône. De l’autre coté de cette surface plane, une rangée de collines barrait l’horizon, et soudain, en levant les yeux, je reconnus la grosse masse rocheuse plantée sur sa colline. Aucun doute, c’était la «Peire que rode » !

    Une demi-heure après j’étais devant le rocher. J’entrai dans l’imposante cavité taillée dans le calcaire et fus surpris par la fraîcheur que la pierre avait conservée de la nuit. Je m’assis sur le sol, le dos adossé à la paroi et je me questionnai sur ce curieux nom de «Peire que rode ». Pouvait-on traduire par pierre qui rôde en comparant ce rocher aux galets qui roulent dans le Rhône et qui ont effectué des centaines de kilomètres, entraînés par les flots impétueux du fleuve ? Certains d’entre eux se sont fixés çà et là sur les coteaux environnants, faisant la réputation des vignobles locaux. D’autres poursuivent un voyage sans retour vers la mer, but ultime d’une errance où ils ne seront plus que grains de sable à l’arrivée. Le nom d’un mas voisin, le Mas Roulepierre, évoque d’ailleurs ce tragique exode. Mais ce n’était guère concevable : on ne peut comparer une énorme masse rocheuse fixée sur une colline à un simple galet.

    Perdu dans mes pensées, un peu engourdi et somnolent après la longue marche du matin, j’entendis soudain une voix. Etait-ce le fruit de mon imagination, le souvenir de mes recherches sur Internet, un rêve éveillé, une communication télépathique entre la matière et l’esprit ? Toujours est-il que dans ma tête résonnait une voix sourde et monocorde qui semblait sortir des profondeurs de la roche.

    C’était étonnant, mais il fallait se rendre à l’évidence : la pierre me parlait ! et chose encore plus incroyable, cela ne me surprenait pas.

    « Mon nom vient tout simplement du langage des anciens car en langue d’oc le mot rode sert à désigner une roue. Il serait donc plus exact de m’appeler « pierre qui tourne » ou « pierre qui vire ».

    Pourquoi ce nom ?

    Il y a bien longtemps un berger, peut-être sous l’effet du soleil, peut-être sous l’effet d’un excès de boisson m’aurait vue faire un tour complet sur moi-même et se serait empressé d’aller conter l’évènement au village. On peut facilement imaginer les réflexions désobligeantes qu’il eut à subir :

    • Quel cigalas ! déjà qu’il n’avait pas bien la tête sur les épaules, à force de compter ses moutons, il est devenu complètement gaga !
    • Un rocher qui se déplace comme un danseur de farandole ! il nous prend pour des gobe-mouches !
    • Il n’y a qu’une bonne sieste qui pourrait lui remettre les idées en place !

    Etc., etc.

    Chaque plaisanterie était accompagnée de grands éclats de rire et ceci dura jusqu’à la fin de l’après-midi et même les jours suivants.

    Après ces quelques jours de rigolade, la vie reprit son cours et chacun vaqua à ses occupations quotidiennes. Plusieurs mois passèrent, et un jour, sans que l’on sache vraiment pourquoi, le pauvre berger fut retrouvé mort au milieu de son troupeau. On l’enterra, mais on ne l’oublia pas. Le souvenir de cette histoire restait dans les mémoires et revenait régulièrement sur la place du marché et autour des tables des cafés. Chaque fois que quelqu’un passait dans mon voisinage, il ne manquait pas de me regarder pour s’assurer si j’étais bien en place et si je n’avais pas discrètement pivoté pendant la nuit. De retour au village on l’interrogeait : « alors la pierre, elle a tourné ? »  Et comme rien ne se passait, peu à peu s’ancrait l’idée que je ne devais pas tourner tous les jours.

    Puis vint à la connaissance de quelques érudits locaux, amateurs d’histoires anciennes, qu’il existait dans d’autres régions des pierres également appelées «Pierre qui tourne» ou «Pierre qui vire», leur nom étant associé à différentes légendes. On m’attribua l’une d’entre elles. Elle prétendait que je protégeais un trésor caché par d’anciennes populations persécutées, aujourd’hui disparues, et que tous les cent ans, en période de pleine lune, je serais capable de pivoter sur moi-même et de découvrir ce trésor caché, l’offrant à la convoitise de ceux qui seraient là au bon moment.

    Cent ans, cela faisait beaucoup à attendre ! Il y eut quand même quelques audacieux qui, croyant en leur bonne étoile, n’hésitèrent pas à venir passer des nuits de pleine lune à me contempler, espérant le miracle qui les rendrait riches, mais ils finirent par se lasser. Beaucoup d’autres préférèrent jouer à la loterie nationale ou à la roue de la fortune plutôt que de compter sur un hypothétique gain de ma part, d’autant plus que dans certaines légendes, s’emparer du trésor n’était pas sans risque et que quelques intrépides y auraient laissé leur vie. Je disparus donc de l’actualité locale; seul mon nom et les légendes qui vont avec sont restés.

    Je suis née de sédiments marins qui se sont déposés il y a environ 130 millions d’années, excusez du peu, et qui ont constitué une couche calcaire que les initiés classent dans l’ère secondaire, plus exactement dans le crétacé inférieur. Pendant tout ce temps j’ai vu apparaître toutes sortes de créatures, aquatiques d’abord, terrestres ensuite. J’en ai vu aussi beaucoup disparaître. J’ai en particulier un souvenir ému pour ces grands reptiles, maîtres du monde, qui se déplaçaient en quête de nourriture dans une végétation luxuriante aujourd’hui disparue et qui ont été brutalement décimés.

    Les hommes étaient encore bien loin d’exister en ces temps là. Je les ai vu arriver, cela fait quelques milliers d’années seulement. J’ai tout de suite senti que ces petits êtres étaient beaucoup plus dangereux que toutes les autres créatures. Ils m’ont vite repérée et comme sur l’un de mes cotés se trouvait une cavité naturellement formée par les eaux de ruissellement, ils se sont empressés de l’agrandir pour en tirer de la pierre et se constituer un abri. Sur ma gauche, ils ont même taillé un escalier rudimentaire afin de monter plus facilement sur la plateforme que constitue ma voûte supérieure dans le but de guetter l’apparition d’éventuels ennemis. Ils m’ont abandonnée ensuite sans scrupule pour se regrouper dans des endroits plus favorables à leur développement.

    Je suis restée seule dans ce magnifique paysage de garrigue, entourée de chênes verts, de lavandes, de romarins, de genévriers, de touffes de thym et d’herbes sèches, toute cette végétation émettant des senteurs incomparables les jours de forte chaleur. J’aime l’aridité de ces lieux et la tranquillité du site seulement perturbé par les randonneurs équestres et les chasseurs. Je n’ai pas l’humeur vagabonde ; mon seul désir est de rester ici le plus longtemps possible. Ma seule crainte : que les hommes s’intéressent à nouveau à moi pour me débiter impitoyablement en morceaux ou même me réduire en simple gravier. Si, toutefois, je servais à édifier des monuments destinés à traverser les siècles, comme les cathédrales, passe encore, mais finir enrobée dans le béton ou engluée dans du goudron, je ne m’en remettrais pas, bien que ces matériaux présentent quelques utilités pour les hommes. Autrefois, ils ne disposaient que d’outils rudimentaires pour extraire la roche de mes entrailles. Aujourd’hui, avec leurs explosifs, leurs perforeuses, leurs tronçonneuses, leurs broyeuses, ils peuvent me pulvériser en quelques jours seulement. A quelques kilomètres d’ici, ils n’ont pas hésité à trancher des collines entières pour permettre le passage des TGV qui vont et viennent entre Paris et le Midi. Je frémis encore à l’idée que j’aurais pu me trouver sur la trajectoire choisie et que ma destinée aurait été de finir éparpillée dans un ballast.

    C’est le progrès disent-ils. Il faut aller de plus en plus vite. Mais savent-ils où ils vont ? Je me console en pensant que tout a eu un commencement et que tout doit avoir une fin. En attendant j’existe, et j’espère profiter encore longtemps du soleil qui me réchauffe dès le matin, du vent qui me rafraîchit les jours de canicule et des nuits sans nuages qui m’offrent de merveilleux spectacles de ciels étoilés. »

    Je revins brusquement à moi. J’étais toujours adossé à la paroi rocheuse contre laquelle je m’étais assis pour me reposer à l’abri du soleil. En face de moi s’étalait un magnifique paysage de garrigue sous un ciel d’un bleu intense. Le rocher était redevenu muet dans l’éclatant concert des cigales. Qu’avait-il voulu me communiquer ? Que sur terre rien n’est éternel, que même ce qui parait indestructible a aussi une fin, que notre environnement est fragile et notre existence brève ? Tout cela paraissait évident, mais les choses évidentes sont parfois les plus difficiles à voir, surtout quand on n’a pas envie de les voir. En tout cas ce site n’était pas ordinaire et méritait une visite. Un rocher qui pivote et qui en plus nous parle, cela ne se voit pas tous les jours ! Ma décision était prise ; j’y amènerai donc mes amis. Je pourrai même leur proposer la promenade en fin d’après-midi, après les fortes chaleurs, et pourquoi pas, une nuit à la belle étoile. L’étrange masse rocheuse, seulement éclairée par la lueur de la lune et du firmament, devrait offrir un spectacle fantasmagorique, et nous laisser un souvenir impérissable. Avec un bon casse-croûte, quelques bouteilles d’un rosé local, la nuit ne serait pas longue. De plus, la semaine prochaine, on allait être en période de pleine lune, et qui sait, la légende pourrait peut-être se réaliser ? Un trésor, même modeste, ne serait pas de refus en ces temps difficiles. Et si la pierre ne tournait pas cette nuit là nous ne nous en formaliserions pas, le vin parviendrait bien à faire tourner les têtes... Une bonne soirée entre amis suffirait à notre bonheur et c’était certainement cela le vrai trésor.

     


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