• par Jean-Pierre Leguéré

     6 janvier 2016 

    Sur le thème : "Portrait d'un personnage mettant en avant un élément particulier"

     

    La main droite de Turpin comportait trois doigts : le pouce, l’index et l’auriculaire. Et, dans l’intervalle, un hideux moignon rose. Qu’en était-il des deux autres doigts : avaient-ils été coupés, tranchés, déchiquetés, tronçonnés, arrachés ? Nul ne savait ou, plus exactement, nul n’évoquait les circonstances de cette double amputation qui nous fascinait. Mais nous devions vivre avec ces trois doigts, sans ces deux doigts. Quand Turpin prisait par exemple — et il prisait beaucoup : sa blague à tabac, en caoutchouc d’un rose foncé, bien proche de la teinte du moignon, restait assoupie sur le bureau tout au long des cours. Le pouce et l’index s’écartaient alors l’un de l’autre au maximum pour créer une petite cuvette, à hauteur du poignet, quant à l’auriculaire, il restait dressé de telle sorte que les deux doigts devenaient les cornes de quelque animal inconnu de nos bestiaires. Puis de la main gauche, il tirait un peu de tabac de la blague et le déposait soigneusement dans la cuvette, enfin, il portait la main vers son nez et, d’un mouvement arrondi du poignet, nourrissait ses narines. Celles-ci aspiraient les grains et les poussières de tabac, énergiquement, à plusieurs reprises, sorte d’éternuement à l’envers. La prise faite, les deux cornes se détendaient ; Turpin frottait alors légèrement sa main sur son pantalon brun, refermait la blague puis reprenait son cours…

    Quand Turpin prenait en défaut l’un d’entre nous : devoir mal fait, ignorance coupable, distraction pendant le cours, nous voyions avec effroi la main se diriger vers le fautif, s’arrêter quelques instants près de sa tête comme pour le désigner puis le pouce et l’index se saisir d’une oreille pour la pincer comme pincent le crabe ou le homard.

    Quand Turpin voulait ponctuer un élément grammatical particulièrement important, souligner la présence d’un faux ami dans les vocabulaires latin ou grec, il levait la main droite, l’index tendu vers le haut et nous regardions l’index comme l’imbécile regarde le doigt au lieu de regarder la lune…

    Ainsi devînmes-nous d’excellents latinistes.

     


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  • par Jean-Pierre Leguéré

    4 novembre 2015

     

    Sur le thème : "Une promenade faite de nuit"

     

    Elle est partie de chez son père, en bas du village, près de chez le boulanger ; elle a foulé les pierres chaudes encore, elle a marché sans regarder les lourdes portes cloutées bleues ou jaunes, ni les moucharabiés, ni les jardins fleuris à moitié cachés derrière les portes ; puis son pas s’est fait plus rapide, comme si une tension la portait ; elle a monté, monté encore jusqu’à percevoir tout en haut de la colline le muret bas du cimetière, et plus loin encore le phare, petit, trapu.

    La voilà bientôt au sommet. Enfant, le lieu l’effrayait. Maintenant elle aime les pierres sobres et blanches qui couvrent le corps des croyants ; sur la stèle de l’une d’entre elles, on peut lire le nom de son grand père, qu’on appelait Boulahya et qui repose là depuis quelques années déjà. L’éternité est palpable dans les cimetières marins magnifiés par l’immensité d’un ciel dépouillé et l’inépuisable rumeur de la mer

    Bientôt elle a contourné le mur du cimetière pour laisser le village derrière elle. Face à elle une pente sauvage couverte d’un maquis de ciste, de myrte, de romarin et de lauriers descend vers la mer. Sans souci de son jean blanc, elle s’est assise par terre, le dos appuyé au mur du cimetière.

    Lui, est arrivé par l’ouest, de l’autre côté du village après avoir monté de semblables ruelles. Comme elle, il s’est d’abord arrêté comme pour saluer ce paysage dont la grandeur lui est familière, puis il est allé vers elle, l’a regardé sans un mot, s’est assis à ses côtés.

    Il y eut un moment de stupeur. La nature semblait figée dans une attente. Incertaine. Les arbres avaient cessé leur bruissement, les oiseaux leurs chants. Quelques nuages blancs, hauts et légers, s’immobilisèrent. Le ciel, bleu un instant plus tôt, vira au jaune orangé que nuança bientôt un rose lumineux puis une couleur de miel et d’or bruni. Leurs regards à tous les deux se fixaient sur l’ouest ; leurs deux corps restaient immobiles ; on les aurait dit en état de sidération.

    Sa main gauche à lui chercha sa main droite à elle, la recouvrit.

    Puis la vie à nouveau respira. Le vent reprit souffle, le jasmin embauma, des martinets traversèrent le ciel, deux chats faméliques jaillirent par dessus le mur du cimetière. Toujours assis, il se rapprocha d’elle jusqu’à la toucher de l’épaule. Plus tard, les premières étoiles les trouvèrent à la même place, graves et muets . Venant du bas du village, très atténuée, leurs parvinrent des airs de malouf, la musique traditionnelle, qu’on jouait devant le café le vendredi soir.

    Elle :

    - À quoi tu penses ?

    Rêveur, Il ne répondit pas tout de suite. Puis :

    - À Icare…

    - Icare ? Celui qui se brûla les ailes au soleil ?

    - Oui c’est à Icare que je pense. Vois-tu, s’il avait bien voulu s’envoler à cette heure douce, même s’il était monté plus haut encore, la cire n’aurait pas fondu, il aurait poursuivi son vol…

    Il y eut à nouveau un long silence. Et puis, tête baissée, comme cherchant quelque chose devant elle, sur le sol, ses longs cheveux noirs cachant son visage, à voix presque basse, elle dit :

    - Tu m’aimes ?


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  • par Chantal Duneau

    12 décembre 2015

                                                                                                                                                    Thème: Faites parler un objet

    Je ne suis qu'un crayon à papier, mais fier de l'être!

    Tête noire et col blanc sur une belle livrée verte, droit comme un i dans le pot de terre cuite, je côtoie mes frères de couleurs et quelques jeunes blancs-becs, à bille ronde, qui rient sous cape, assurés qu'ils sont de notre fin prochaine. Ils ne peuvent pourtant s'enorgueillir comme moi d'un chiffre et d'une lettre gravés sur le flanc en l’occurrence un 3 B, garant de mes performances.

    Eh oui! Je sors d'une édition numérotée! J'ai la mine affûtée et la taille fine car je suis issu du bois dont on fait les outils indispensables à ceux qui écrivent, dessinent et tirent des plans sur la comète.

    Pour ma part, je suis au service d'une personne qui gratte beaucoup le papier, se croyant sans doute quelque talent! Ainsi, des heures durant, je vais, je viens, je cours sur des feuilles blanches, je gribouille, griffonne, rature, souligne, surligne, surnote, surcharge, ébauchant même parfois une silhouette, un visage, un paysage... Il m'arrive, je l'avoue, de forcer le trait -sinon l'admiration- ce qui me vaut d'être mis à pied.

     

    Vous les pinceaux, ne vous gaussez pas car un sort peu glorieux vous attend: un jour, amaigris, le poil ras, vous sécherez de dépit dans vos bocaux maculés de peinture.

    Quant à vous, les crayons de couleurs, nuancez vos comportements.

    Vous pavoisez dans vos éclatantes tenues mais votre usage est limité et vous devez vous unir pour produire quel qu’effet quand moi je garde mon indépendance!

    Silence la gomme! Vous prétendez pouvoir m'anéantir? Que nenni, je renais de suite, à l'endroit même que vous venez de quitter

     

    Non! L'objet de mes inquiétudes est ailleurs: à quelques rames de moi, sur le bureau voisin, me parviennent les ricanements de mes ennemis jurés: claviers divers, machines élagueuses dont on sort meurtri et diminué, feutres débiles, souvent d'ailleurs indélébiles, correcteurs en tout genre et plus loin disséminés dans la maison: dictaphone, téléphone, smartphone et autres beaux parleurs... Qu'on ne s'étonne pas alors de ma mine de papier mâché: La lutte est serrée et je m'imagine déjà en fin de vie, rejoignant dans la coupelle transparente, mes prédécesseurs en habit vert, réduits à leur plus simple expression: un centimètre à peine (taille imposée par la propriétaire!). J'entrerai alors dans l'académie des bouts de crayon, en hommage aux service rendus à la culture!

    Frères crayons*, qui après nous vivrez, ne faites pas grise mine, car si la horde des adversaires -qui se réclament de la toile- grossit et rend notre avenir incertain, rappelez-vous qu'en ce bas monde, tout passe et tout s’efface... Oui, c’est cela: tout s'efface!

     Confession d'un crayon

                                                                                                                                         Chantal Duneau  

     

    * allusion à l’épitaphe de Villon

     


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  • par Nadine Foissotte

    mai 2014

     

    La vieille pendule posée sur la cheminée de marbre marque chaque seconde et comble le vide du petit appartement malgré la télévision qui du matin au soir crache ses couleurs agressives et ses annonces publicitaires où tout est jeune et beau.

    Le soleil se faufile entre les rideaux entrebâillés et projette sur les murs au papier peint fleuri et défraîchi des ombres du passé qui sourient et rappellent le temps du bonheur.

    • Minou…minou, viens Balthazar, dit en se baissant la vieille dame, tout en attrapant délicatement un chat noir au poil brillant et aux yeux verts perçants.
    • Miaou, répond-il de contentement, se laissant caresser voluptueusement.

    Les minutes s’étirent, les yeux bleus délavés mais encore vifs derrière ses lunettes cerclées, les cheveux blancs légèrement ondulés, petite et menue aux chevilles si fines qu’elles semblent prêtes à céder à chaque mouvement, elle se lève avec précaution de son antique fauteuil Voltaire et murmure :

    • Je vais aller chercher mon pain, puis je ferai cuire quelques pommes de terre, allez ça ira bien pour aujourd’hui….Ah oui, bien sûr, ne pas oublier ta pâtée, ajoute-t-elle à l’intention de Balthazar qui se frotte et s’enroule autour de ses frêles jambes.

    Suzanne vit seule dans son petit appartement du second arrondissement de Paris. Après cinquante-huit ans de vie commune, son mari est parti vers d’autres cieux, ils n’ont pas eu d’enfant. Son unique famille, un neveu qui vit en Australie et lui envoie à chaque Noël une carte qu’elle ajoute à la collection sur la grande glace qui surmonte le buffet breton qu’elle a hérité de ses parents.

    Elle regarde par la fenêtre et observe le ciel d’un bleu si intense qu’il serait d’une pureté incroyable s’il n’était zébré de petits filets blancs tels des rubans de dentelles aériennes ; pas le moindre souffle de vent dans les marronniers qui bordent l’avenue. Son regard s’accroche aux deux silhouettes qui sortent à cet instant de l’immeuble, une jeune femme un peu ronde, l’air revêche en tenue de sport et queue de cheval qui balance au rythme de ses pas et un garçonnet chétif aux cheveux si roux qu’ils paraissent rouges dans la lumière de l’été, il semble apeuré mais cependant curieux de la vie de la rue.

    « Il ne fait vraiment pas froid, peut-être un petit gilet sur les épaules tout de même » décide-t-elle, puis prend son porte-monnaie noir tout usé, son cabas et sa canne. Après avoir fermé son appartement, elle descend lentement et prudemment les trois étages qui la mènent à la grande et lourde porte d’entrée.

    Aussitôt happée par le bruit des véhicules qui se disputent âprement la chaussée, agressée par l’odeur nauséabonde que vomissent les pots d’échappement, elle chemine lentement sur le large trottoir encombré.

    Tiens, au rez-de-chaussée du 26, ils déménagent pense-t-elle, bousculée par deux grands costauds qui ne prennent pas la peine de s’excuser. Un adolescent, cheveux longs au vent, la dépasse à grande vitesse sur son skate ; plus loin au petit supermarché, le camion de Rungis livre des primeurs, il bloque la circulation et l’on entend les klaxons depuis le bout de la rue. Elle observe les conducteurs qui, dans leurs voitures, s’impatientent en tapant violemment sur leur volant, ou pire :

    • Alors tu dégages avec ton camion C…..

    Le livreur indifférent continue son déchargement, fait signer son bon de livraison, remonte dans son véhicule et s’infiltre dans la circulation pour, dans un autre quartier, recevoir son lot d’insultes quotidien.

    « Surtout ne pas oublier le repas de Balthazar ». Elle entre dans le magasin, se dirige à petits pas vers le rayon qu’elle connaît bien.

    Les clients sont peu nombreux, ils emplissent en hâte leur caddie ou leur panier et s’engouffrent bien vite dans la file des caisses. La vieille dame est dépassée par une grosse femme qui sans même un regard, pose sur le tapis quelques emplettes tout en tapant du pied, jetant un regard insistant vers la caissière qu’elle trouve sans doute trop lente et qui, sans un sourire, encaisse et lance un merci laconique de circonstance.

    Dans la rue, la foule des piétons a grossi. Un monsieur tiré à quatre épingles et feutre vissé sur ses cheveux blancs se laisse mener par son chien qui aboie après on ne sait quel insecte ; une mère de famille se hâte tout en agitant une poussette où un bébé, impatient d’avoir sa ration de lait, braille à en perdre le souffle ; plus loin, une autre, de volumineux sacs au bout des bras, allonge le pas, suivie d’une nombreuse marmaille encombrant le trottoir de leurs vélos trois roues et de leurs trottinettes.

    Suzanne, craintive, navigue lentement, du mieux qu’elle peut, au milieu de cette jungle urbaine, peuplée de citadins pressés et désabusés. Arrivée devant la boulangerie du coin, elle pénètre dans la boutique et prend sa place dans la file, sous l’œil détaché des vendeuses qui parlent comme des machines bien huilées :

    - Bonjour Madame, l’air interrogateur

    - 2 baguettes bien blanches s’il vous plaît

    - 1.70 euro

    - Merci Madame, bonne journée.

    - Et pour vous ce sera ?

    - Une demi-baguette répond Suzanne

    - 43 centimes, le regard sans vie s’impatiente lorsqu’elle voit la vieille dame fouiller dans son porte-monnaie à la recherche de la somme exacte. Suzanne tend sa monnaie

    - Voulez-vous vérifier….

    - Merci, bonne journée, répond la vendeuse d’un air mécanique tout en relevant la tête, et pour Monsieur, ce sera ?

    Décontenancée, elle attrape sa demi-baguette, se retourne et peine à trouver son chemin parmi les clients silencieux, qui sans un regard vers elle, piaffent d’impatience.

    Il est midi maintenant, elle est comme enveloppée par la violence des bruits de l’avenue : le long et strident hurlement de la sirène d’une ambulance qui grille le feu, le crissement des pneus sur l’asphalte, la sonnerie des vélos qui s’insèrent dans la circulation intense. Elle est étourdie par les piétons qui en un incessant va-et-vient traversent au feu, en courant pour certains, se bousculant sans ménagement et par ce couple qui sans vergogne se dispute sous l’abri bus.

    Son esprit s’évade et se souvient. Dans les années 50 avec Armand, ils ont souvent parcouru les rues de Paris, les grands boulevards, celui des Italiens, de l’Opéra et des Capucines, ils allaient à pied jusqu’à l’église de la Madeleine ou bien au cinéma « Studio 43 ». Ils s’asseyaient sur un banc et discutaient un moment avec les badauds.

    Et le restaurant chinois de la rue de Gramont, c’était comme un goût d’exotisme, les clients se saluaient et en quelques regards complices semblaient dire « on est bien là »… les pissotières vertes du boulevard Montmartre, toute une époque !… les colonnes Morris recouvertes d’affiches autour desquelles on devisait sur les spectacles, le kiosque à journaux et la guérite de la marchande de billets de loterie nationale « les gueules cassées ». On lui achetait un billet, elle prenait de vos nouvelles ou nous donnait celles du quartier. Comme c’est loin, les gens se parlaient, s’interpellaient et osaient se sourire.

    Suzanne retrouve son immeuble, croise dans l’escalier le garçon qui vit sur son palier, il descend quatre à quatre les marches, casque sur les oreilles, perdu dans sa musique et ses pensées. De bonnes odeurs de cuisine parviennent à ses narines :

    « Un bourguignon hume-t-elle avec envie, comme ça sent bon ! ». Il y a bien longtemps qu’elle n’en a mangé. « Pour une personne seule, vous pensez, on ne cuisine pas ! »

    Alors qu’elle atteint presque le palier du second, elle perçoit un bruit sourd et régulier qui semble venir de l’appartement….

    La porte s’ouvre brusquement, laissant apparaître l’enfant aux cheveux rouges, il est assis dans l’entrée et se tape la tête contre le mur.

    - Je descends la poubelle, tu ne bouges pas dit, d’un ton sans douceur, la jeune femme aperçue ce matin.

    Étonnée, Suzanne est dépassée sans précaution, elle monte les trois marches qui la séparent du garçonnet…. Leurs regards s’unissent un long moment, il a cessé tout mouvement, elle est figée sur le palier. Surpris, désorientés, ils s’observent minutieusement l’un et l’autre.

    Elle n’a jamais vu de tels yeux, rouges tellement rouges et tristes tellement tristes. Il n’a encore jamais rencontré de regard aussi doux, aussi bienveillant.

    Le temps s’est immobilisé.

    - Comment….

    Elle ne peut finir sa phrase, l’ouragan en jogging violet est déjà sur le pas de la porte qu’elle referme sans aucun ménagement.

    La vieille dame se hisse avec peine au troisième étage, l’esprit encore occupé par l’enfant rouge comme elle le nomme déjà.

    Alors qu’elle prépare la pâtée de son chat, qu’elle épluche avec application deux petites pommes de terre et les met à cuire, elle ne cesse de penser à cette curieuse rencontre. Ce garçon est pâle, si pâle sous sa tignasse flamboyante, ses yeux sont rouges mais il n’a pas les cheveux blonds presque blancs comme ceux des albinos pense-t-elle. Il semble si malheureux. Pourquoi se tape-t-il la tête ? Est-ce que la jeune femme est sa mère ? Tant de questions se bousculent. Elle voudrait comprendre et guette les bruits qui proviennent de l’étage du dessous.

    Dans l’après-midi alors qu’elle s’est assoupie, le livre qu’elle tient encore entre les mains s’échappe au vacarme que fait soudain Balthazar qui gratte énergiquement la porte-fenêtre du balcon.

    - Oui, oui, voilà… Comme tu es impatient… Allez, tu peux aller à ta caisse, lui murmure-t-elle tout en ouvrant la baie qui laisse entrer un flot de lumière.

    L’enfant est là sur le balcon juste en dessous, légèrement à droite, « c’est le balcon de la chambre pense-t-elle ». Il est calme, immobile, recroquevillé, les yeux tournés fixement vers le ciel comme s’il attendait quelque chose.

    Suzanne essaie d’attirer son attention

    - Pstt.. pstt..coucou…

    - …

    - Coucou, coucou…

    Enfin, il relève la tête et son étrange regard se tourne vers elle, interrogateur. Comme le matin, il pressent la douceur en elle et son désir de l’aider. Elle devine un tourment intérieur : il a peut-être besoin d’elle.

    - Comment t’appelles-tu, lui dit-elle doucement

    Alors que ses lèvres s’ouvrent, deux bras le tirent vers l’intérieur et la fenêtre se referme. La vieille dame est émue par ce moment de confiance entre elle et l’enfant. Peut-elle faire quelque chose pour lui ?

    Le temps s’étire lentement. Alors qu’elle regarde, sans vraiment la voir, la télévision qui diffuse une émission sur les grands fauves d’Afrique, elle décide qu’elle ne peut rester indifférente, ouvre sa porte et descend sans empressement l’escalier qui la conduit à l’étage du dessous, essayant vainement de formuler en pensée la question qu’elle veut poser. Après quelques hésitations, elle se décide à frapper.

    Aucun bruit, les minutes passent, elle frappe à nouveau. Enfin, un raclement derrière la porte qui s’entrouvre laissant tout juste voir un visage peu amène :

    - Oui, qu’est-ce que c’est ?

    - Madame… Hum, excusez-moi, je suis votre voisine du dessus… Hum… Nous ne nous connaissons pas… mais… j’ai eu l’occasion de voir votre petit garçon… je voulais… vous proposer…. Enfin, peut-être…que je pourrais vous rendre service… Hum…Voyez-vous, je suis seule….le garder parfois… si vous avez besoin….

    Un silence glacial s’installe.

    - Désolée, bredouille la vieille dame décontenancée en se retournant tout en s’aidant de sa canne avec maladresse

    - Attendez, attendez… Je ne pense pas que vous puissiez m’aider…mais je vous remercie de votre proposition répond la femme en refermant aussitôt la porte sur son visage fatigué qui s’est furtivement adouci.

    Suzanne remonte posément jusqu’à son appartement, frustrée mais cependant rassérénée car il lui semble qu’un pas a été franchi.

    Après une nuit entrecoupée de longues insomnies, le petit matin la trouve déjà debout pleine de courage : petit déjeuner, toilette, Balthazar, ménage, lavage… tout lui semble plus léger aujourd’hui. Elle est décidée, il lui faut trouver un moyen d’entrer en contact avec l’enfant.

    Elle guette depuis son balcon les allées et venues des habitants de l’immeuble qu’elle connaît bien pour les observer sans curiosité malsaine depuis si longtemps. Mais aucun ne l’intéresse, elle attend l’unique personne qui est l’objet de toutes ses pensées, un surprenant petit garçon.

    Enfin, comme la veille, la femme et l’enfant sortent de l’immeuble. Ils empruntent la grande avenue et s’éloignent. Suzanne est prête, attrape son gilet et sa canne dans l’entrée, quitte son appartement et descend, préoccupée, l’escalier qui lui paraît moins fatiguant ce matin. Arrivée dans la rue, elle traverse la chaussée pour aller s’asseoir un peu plus loin sur le banc placé sous un des marronniers qui procurent une appréciable fraîcheur en période estivale. « Un excellent poste d’observation, je ne peux les manquer » pense-t-elle.

    Elle attend longtemps. L’heure du déjeuner est largement dépassée, pourtant elle ne s’impatiente pas, elle a tout son temps. Les passants ne voient même pas la vieille dame assise, clouée ainsi depuis le milieu de la matinée.

    « Ah les voilà » Ils débouchent au coin de l’avenue, l’enfant l’aperçoit et une esquisse de sourire pointe sur son fin visage. Ils approchent rapidement. Elle sort de son sac quelques morceaux de pain qu’elle lance devant elle, aussitôt, une dizaine de dodus pigeons atterrissent à ses pieds et picorent avec voracité.

    - Veux-tu jeter du pain aux pigeons dit-elle au garçon arrivé à sa hauteur

    Sans un mot, il s’approche de la main ridée et blanche aux taches brunes qui tend quelques croûtons. Contre toute attente, l’autre main le lâche et le laisse faire.

    Après une courte hésitation, la jeune femme s’assoit sur le banc et contemple sans expression le tableau que forment les pigeons voletant autour de l’enfant.

    Ni l’une, ni l’autre ne prononcent une parole. L’enfant paraît détendu. Suzanne se lève, prend son sac, dit « au revoir, à bientôt » et rentre tranquillement dans l’immeuble sans se retourner.

    Elle est heureuse la vieille dame, elle chantonne tout en se coupant une tomate agrémenté d’un œuf dur. Tout lui semble plus gai aujourd’hui : la météo est clémente, il fait chaud bien sûr mais pas trop, le soleil radieux s’introduit dans l’appartement lui donnant des couleurs chatoyantes et la rue en ce début août est enfin plus calme, c’est dimanche et Paris semble désert.

    Après le déjeuner, Suzanne s’installe avec plaisir dans son fauteuil « j’ai bien mérité une petite sieste ».

    C’est le bruit de coups frappés avec force qui la sortent d’un sommeil réparateur. Balthazar sur son coussin fait le gros dos, contrarié d’être dérangé. Elle se lève avec difficulté et regarde par l’œilleton avant d’ouvrir : la jeune femme du dessous, tenant l’enfant par la main, est sur le palier, écarlate, semblant essoufflée et agitée.

    Aussitôt qu’apparaît la vieille dame dans l’encoignure de la porte, un flot de paroles la laisse indécise :

    - J’ai des soucis… on m’appelle auprès…. en urgence. Pouvez-vous me le garder… J’espère revenir vite….

    Suzanne s’apprête à acquiescer, mais la queue de cheval dans un tourbillon a déjà atteint le palier du dessous.

    L’enfant est impassible, d’une main légère sur l’épaule, elle le pousse doucement à l’intérieur.

    - Rentre petit, ne reste pas là. Viens t’asseoir ici. Comment t’appelles-tu ?

    - ….

    - Si tu ne veux pas répondre, ce n’est pas grave dit-elle tout en se détournant du regard pourpre qui l’attire irrésistiblement

    - Ma…ti répond-il d’une voix hachée

    - C’est un très joli nom. Quel âge as-tu ? ajoute-t-elle tout en le conduisant vers le fauteuil

    - …..

    Elle sent qu’il ne faut pas insister, c’est difficile pour lui comme pour elle. Il n’a pas peur. Elle est incroyablement détendue. Elle allume alors la télévision, « des chansons ça devrait lui plaire ». Mais elle découvre qu’il s’écarte très vite, il ne peut ou ne veut regarder les couleurs violentes envoyées par l’écran au rythme de la musique.

    - Si tu veux, je peux te faire des crêpes pour le goûter.

    Les yeux de Mati s’arrondissent de plaisir, Suzanne est sur un nuage. Il y a si longtemps qu’elle n’a eu à s’occuper de quelqu’un. Pendant qu’elle casse ses œufs, pèse sa farine, remue, fouette, ajoute le lait, l’enfant, curieux fait le tour du petit appartement, prend parfois un objet, le regarde et le repose. Mais très rapidement, il est attiré par la porte-fenêtre.

    - Installe-toi sur le balcon si tu veux lui dit Suzanne, je fais cuire mes crêpes et ensuite nous ferons la dinette tous les deux.

    Son visage s’illumine un instant, il est paisible et reste ainsi très longtemps les yeux fixés sur le même point dans le ciel lumineux de la fin de l’après-midi.

    Le parfum des crêpes embaume tout l’appartement, ils s’en régalent sans compter, encore une, au sucre ? à la confiture ? Ils dégustent, ne se parlent pas mais nul besoin de paroles entre eux.

    Confortablement installée, l’enfant confiant et détendu sur ses genoux, le nez dans ses cheveux, elle le respire avec un plaisir non dissimulé, tout en lui chantonnant doucement toutes les chansons qui lui reviennent du temps lointain de son enfance. Les heures défilent ainsi trop vite, le soleil bas et rouge disparaît entre les immeubles. La magie est soudain rompue par quelques coups secs frappés à la porte. Un merci vite expédiée, une vague phrase d’excuse et la jeune voisine attrape l’enfant et s’en va.

    Ils sont partis. L’appartement est vide et silencieux. Suzanne allongée dans son lit est seule mais comblée, elle revit chaque minute, chaque seconde de ces moments tellement inattendus, de cet après-midi si merveilleux, si exceptionnel !

    Comment pourrait-elle dormir ? C’est une nuit d’été chaude et oppressante, l’orage menace et gronde au loin, le sommeil se rebelle. La vieille dame vêtue d’une longue chemise blanche se relève péniblement et s’installe dans son vieux fauteuil devant la fenêtre.

    En dépit du tonnerre qui se rapproche et des éclairs qui zèbrent brièvement le ciel, tout est inhabituellement calme. Suzanne ne peut contenir une soudaine pulsion, elle se lève et ouvre tout en grand la porte-fenêtre… Le ciel sombre est chargé de nuages grisâtres, son regard est attiré par une vive clarté d’un surprenant bleu semblant venir du bas ; elle se penche légèrement et aperçoit l’enfant, il est lové sur sa mère qui lui caresse les cheveux. Il joue avec une épée qui, au moindre battement scintille d’une lumière céruléenne qui rayonne et les enveloppe tout entiers. Il est apaisé dans les bienveillants bras maternels. Le visage détendu et souriant, heureux, les yeux, enfin espiègles, comme de précieux rubis la fixent. Il lui sourit…

    Son cœur se remplit de joie. Après quelques moments intenses d’éternité, elle rentre, se dirige lentement vers son fauteuil, s’assoit, s’installe avec un soupir de contentement, ferme les yeux.

    Un ultime éclair, violent, éclaire la pièce, tandis qu’une incroyable lumière blanche l’appelle au bout du tunnel. Les traits détendus, elle est très belle,

    Et puis… plus rien.

     


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  • par Louis-Marie Roussiès

     2 novembre 2015

     

    Comme à chaque sortie en mer, Tristan Lambert, le capitaine du bateau de pêche «  La Maria » éprouvait un grand plaisir : partir plusieurs jours, rechercher les bancs de poissons, affronter les hautes vagues, prévenir les dangers, commander à ses matelots, vivre des moments d’angoisse, avoir la mer comme seul paysage à 360° tout autour… autant de défis, de situations extraordinaires, de moments intenses, pour lesquels il n’aurait pu renoncer…

     

    Les longues années passées en mer avaient marqué son visage : des traits burinés, un teint hâlé, de profondes rides sur son front. Ses yeux plissés, son regard perçant recherchaient un sourire, un lien, une bienveillance chez son interlocuteur. Peu bavard, quasiment taiseux, chacun savait qu’il gardait en lui ses ressentiments ; l’alcool seul, avait le pouvoir de le rendre loquace au cours des longues veillées d’hiver ou les soirs de tempête, aux cafés du port. C’est alors qu’il faisait revivre les instants pathétiques dans lesquels l’angoisse de la mort proche, partagée avec les autres marins, l’avait envahi. Brusquement, il revenait dans l’instant, remerciant la mer de l’avoir épargné, de l’avoir gardé si proche de sa femme bien aimée, de ses enfants adorés, de ses amis inoubliables. On le respectait dans le port pour son dynamisme et son sang-froid dans les moments difficiles.

     

    Une petite équipe de matelots fidèles œuvrait avec bonheur sur son chalutier, complètement modernisé pour la pêche en haute mer. Beaucoup regrettaient la pêche sur des petits chalutiers près des côtes : un rythme plus humain, une convivialité, une solidarité entre les marins, le partage du butin… des valeurs un peu oubliées. Aujourd’hui, le souci de la rentabilité nuisait aux longs moments d’échanges, et la tâche, au moins aussi rude, n’était guère mieux payée. On avait gardé de ce temps-là, un lien fort, inaltérable entre les hommes.

     

    La météo annonce un temps plutôt maussade mais pas de tempête à l’horizon.

     

    Franck est confiant. On lui a signalé des bancs de poissons à deux jours de bateau, on va sans doute compléter un butin déjà riche depuis le début de l’année ! Son fils de 16 ans, Antoine, attiré par l’appel de la mer l’accompagne.

     

    A peine sortis du port, un ballet de goélands les poursuit par des cris perçants.

     

    « Ils devraient attendre notre retour pour se gaver, on les a trop gâtés la dernière fois, s’écrient quelques marins ».

     

    La terre s’éloigne définitivement de leur vue, seuls le bruit des moteurs et l’éclaboussement des vagues sur la coque les accompagnent, les rassurent. Au milieu de la passerelle le capitaine surveille les écrans radars et conduit les mouvements du bateau ; les quelques informations de la radio sont rendues inaudibles en raison d’un grésillement tenace. « Impossible d’avoir des infos sur la météo ! »

     

    Le parcours paraît long ! On s’occupe comme on peut à bord par de multiples petites tâches pour la préparation de la pêche. (Vérifier les chaluts, nettoyer les frigos, surveiller les moteurs…). On observe la mer juste avant qu’elle ne soit fendue par l’étrave du bateau, elle révèle des choses extraordinaires : des profusions de poissons gobés par des fous de Bassan.

     

    Dans les eaux internationales, la pêche est abondante, mais de plus en plus réglementée. Franck a trouvé un riche banc de poissons auquel se sont déjà attaqués un bateau russe et un bateau norvégien.

     

    Sur place, le largage des chaluts se fait dans un fort roulement de tonnerre ; trois lourds filets s’enfoncent dans la mer et disparaissent, le radar permet de suivre l’évolution de la pêche. Dans les minutes suivantes les gros engrenages ramènent les filets remplis de toutes sortes de poissons « c’est un super jour, on reviendra plus tôt que prévu ! ».Le travail est rude pour tout le monde : il faut trier, dépecer, classer, mettre dans de grands frigos et puis recommencer…Une odeur nauséabonde se dégage. «  C’est bien les gars, mais l’horizon se couvre, un gros grain nous attend, dépêchons-nous ! » .Une forte bourrasque arrive tout à coup, ébranle le navire « Rentrez les chaluts sinon nous allons chavirer ! » les hommes font de grands efforts, ballottés au gré des vagues, certains vomissent, d’autres hurlent ; des forces contradictoires secouent le bateau. Un apaisement, un calme tout relatif arrive après de longues minutes. Soudain des matelots crient « un petit bateau à la dérive, des migrants ! » des gens couchés lèvent la main vers eux, d’autres ne bougent pas, on devine des femmes et des enfants « on va essayer de les sauver, crie le capitaine, il faut s’approcher… faites une manœuvre doucement dans leur direction, on ne peut pas mettre un bateau à la mer, c’est trop risqué, on va utiliser des cordes ou des chaluts… » Les écrans radars annoncent une accalmie de courte durée. La Maria s’ébranle dans une houle assez forte, le petit bateau tient. L’angoisse se devine sur les visages. « J’ai appelé les secours mais nous sommes dans les eaux internationales, c’est très compliqué, une frégate peut-être, mais pas question d’envoyer un hélicoptère, le temps est trop perturbé ! » Soudain on voit trois hommes plonger et se diriger vers le bateau  « ils sont fous, des désespérés, l’eau est froide, ils ont des combinaisons, jetons leur des cordes, mettons les chaluts à la mer… » Ils s’approchent laborieusement, saisissent les cordes ; on tire par l’arrière, ils lâchent, se rattrapent, on les ramène finalement dans la cale, transis, râlant, crachant, épuisés. Leurs regards en disent long ; ils sont très jeunes, on se croirait dans un film d’horreur « Réchauffons-les dans des couvertures, donnons-leur une boisson chaude ; quelle idée de partir de son pays dans ces conditions !... et pour les autres que fait-on ?  

     

    - Un homme a plongé, il s’éloigne de nous! On ne peut rien pour lui.

     

     -Lançons des cordes vers le bateau, on pourra peut-être les entraîner vers nous, si l’un d’eux en attrape une et l’accroche quelque part.»

     

    La houle ne se calme pas, bien au contraire, « Ah ! Voilà une frégate qui s’approche… » Catastrophe ! Le bateau vient de chavirer, les corps se débattent dans la mer… « Ils vont tous crever, les secours arrivent trop tard ! » 

     

    Franck ne fait que hurler, donne des ordres dans tous les sens, s’en prend aux éléments. On fait une manœuvre. « Rien à faire, c’est une catastrophe ! Rentrons au port, en accélérant nous y serons demain matin, tant pis pour la pêche ! Sauvons nos trois rescapés … »

     

    Les visages sont fermés. On allonge les naufragés sur des lits de fortune. L’infirmier prend soin d’eux, les aide à respirer, surveille le battement de leur cœur… On regarde la mer devenue le cercueil de ces malheureux, tout a disparu, et les réflexions vont bon train. « Que va-ton dire de nous ? On s’est mal débrouillés ! Je n’aurais jamais imaginé voir cela ! Pourquoi prennent-ils tant de risques ? » On entend aussi quelques rares réflexions racistes « On n’a pas besoin de tous ces gens, qu’ils se débrouillent chez eux ! » Très nerveux le capitaine fait les cent pas, remonte le moral, apaise les tensions. « J’ai envoyé des messages, la police et les garde-côtes nous attendent au port »

     

    On parle beaucoup, on s’agite, on jette un coup d’œil aux migrants qui commencent à prononcer des mots incompréhensibles ; on devine que ceux-ci ressemblent à un « merci », on devine aussi qu’ils viennent de Libye…

     

    Les moteurs en surrégime souffrent. « Attention ralentissez un peu, il ne manquerait plus qu’ils nous lâchent ! » hurle Franck.

     

    Des messages d’encouragements et des conseils pour les soins des migrants sont reçus.

     

    La côte approche enfin ; soulagement autant qu’appréhension !

     

    La police les accueille, des journalistes se faufilent, les ambulanciers s’activent...

     

    Un comité d’accueil pour les migrants s’approche, pose des questions.

     

    « Ecoutez, dit Franck, je ne vais pas rentrer dans les détails, nous en avons sauvé trois, mais une vingtaine au moins, sont au fond de la mer, les secours sont arrivés trop tard, nous sommes fiers d’avoir été utiles, vous savez que les marins sont très solidaires, on a fait ce qu’on a pu, j’ai dû rentrer vite, abandonner ma pêche qui s’annonçait abondante, pourrions-nous avoir des regrets ? »

     

    « On vous appelle au téléphone, c’est le commandant de la Frégate, Le Garrec ! »

     

    Anxieux, Franck arrache le téléphone…

     

    -Je tenais à prendre de vos nouvelles et à vous dire que nous avons pu sauver cinq migrants en mettant une chaloupe à la mer, ils vont bien.

     

    -C’est une petite consolation.

     

    -Sans votre sang froid, tous seraient au fond de la mer !

     

    -Je n’ai fait que mon devoir, on se verra un jour, j’espère. »

     

    Franck répond à toutes les questions d’un journaliste de « Ouest France »et se trouve avec ses marins au milieu d’une bande de badauds.

     

    Son fils Antoine s’approche :

     

    « Papa, j’ai toujours pensé que la mer était quelque chose de beau mais aussi de tragique, et que les marins étaient des gens courageux ! Je suis de plus en plus attiré par ce métier, demain je repars avec toi… »

     


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